Le mois de mai est aujourd’hui reconnu dans toute l’Église catholique comme le « mois de Marie », un temps privilégié durant lequel les fidèles se tournent vers la Vierge avec une affection particulière.
Cette dévotion n’est pas née d’un décret officiel, mais d’un lent développement spirituel et liturgique, enraciné dans l’histoire, la symbolique du printemps, et un élan profond du cœur chrétien envers la Mère de Dieu.
L’antiquité : un mois consacré aux divinités féminines
Bien avant l’ère chrétienne, le mois de mai était déjà associé à la féminité, à la maternité et à la fertilité. Dans la Rome antique, le mois de mai était dédié à Maia, déesse du renouveau et de la fécondité. Des rites étaient célébrés pour honorer les forces de la nature et de la vie renaissante. Avec l’arrivée du printemps, les fleurs, les champs et les chants accompagnaient ces célébrations.
Lorsque le christianisme s’est répandu dans le monde romain, il a souvent « transfiguré » les traditions locales pour leur donner une signification nouvelle. Ainsi, ce mois qui exaltait autrefois la nature et la fertilité est devenu peu à peu un mois tourné vers Marie, la plus belle des femmes, Mère de Dieu et figure par excellence de la fécondité spirituelle.
Du Moyen Âge à la Renaissance : les prémices d’une dévotion mariale printanière
Dès le Moyen Âge, la dévotion à Marie prend de l’ampleur dans l’Église. Elle est honorée par des hymnes, des processions, des prières et des œuvres artistiques. Les poètes, les mystiques et les théologiens chantent sa pureté, sa douceur et son rôle de médiatrice.
À cette époque, il n’y a pas encore de mois spécifiquement dédié à la Vierge, mais mai est souvent choisi pour des célébrations fleuries en son honneur. Dans les monastères et les villages, on élève des autels, on tresse des couronnes, on chante des chants marials pour honorer « la Rose sans épine ».
Au XVe siècle, on trouve des références de plus en plus fréquentes à la Vierge dans des prières liées à la nature et à la beauté printanière. La symbolique florale et lumineuse du mois de mai est naturellement associée à Marie, la « toute belle » dont le cœur est ouvert à la lumière divine.
Le XVIIIe siècle : la naissance officielle du « Mois de Marie »
C’est au XVIIIe siècle, en Italie, que naît véritablement la dévotion structurée du mois de Marie. Le père jésuite Alfonso Muzzarelli (1749-1813) codifie cette pratique dans un ouvrage intitulé Il Mese di Maria, publié en 1785. Ce livret propose des méditations quotidiennes, des prières et des exercices spirituels pour chaque jour du mois de mai, consacrés à Marie.
L’idée se répand rapidement dans les congrégations jésuites, puis dans toute l’Italie, avant de franchir les frontières. Le mois de Marie devient une pratique spirituelle populaire et fervente, soutenue par des évêques, des paroisses, et des familles.
C’est aussi au cours de ce siècle que se développe la coutume de « couronner » une statue de la Vierge en mai avec des fleurs, un geste devenu emblématique dans de nombreuses régions du monde.
Le XIXe siècle : la diffusion dans toute l’Église
Sous l’impulsion des papes Pie VII, Pie IX, Léon XIII et Pie XII, le mois de Marie s’installe définitivement dans la piété catholique. Des indulgences sont accordées aux fidèles qui participent aux prières du mois de mai. Le pape Léon XIII, en particulier, encourage la récitation du chapelet en famille durant tout le mois.
Dans les campagnes comme dans les villes, la dévotion prend de multiples formes : récitation publique du rosaire, chants marials, veillées, processions fleuries, autels domestiques ornés de fleurs et de bougies.
Cette piété populaire touche toutes les classes sociales, et devient un véritable pilier de la spiritualité chrétienne du printemps.
Le mois de Marie aujourd’hui
Aujourd’hui encore, dans les paroisses, les familles, les écoles et les communautés religieuses, le mois de mai reste un temps fort de la vie chrétienne. Il permet de vivre la foi avec simplicité, avec cœur, et de redécouvrir Marie non comme un personnage lointain, mais comme une mère proche et attentive.
Dans un monde parfois marqué par la dispersion, le bruit et l’indifférence, le mois de Marie offre un espace de douceur, de silence, de prière. Il est un temps pour se recentrer sur l’essentiel, pour faire grandir la foi et la confiance en Dieu, à l’école de Marie.